mercredi 29 février 2012

L'esprit des bois

(03)




L’esprit des bois

La vie dans les bois ressemble étrangement à celle qui est perçue dans les rêves. Parfois elle semble apaisante, source d’accord entre le réel et l’imaginaire. Par ailleurs, elle peut revêtir des formes angoissantes ou incertaines là où les sens se nourrissent d’affabulations mentales.

Alors que la forêt semble momentanément désertée par la présence humaine, on peut entendre comme un murmure qui se transforme en chuintement et qui se propage d’arbre en arbre.
Serait-ce le vent ? Le son du vent est un chant, une mélodie appauvrie mais tout de même pourvue de quelques notes tenues et variables, nombreuses si l’intensité du vent est grande.  
Le ru dans le ravin ? Le bruit de l’eau se heurtant aux galets contient des sons qui se chevauchent, multiples et parfois ténus.

L’esprit de la forêt est à la fois un son continu, une respiration perceptible lorsque les activités humaines sont inexistantes. Pour mieux saisir cette essence, il est préférable de s’asseoir au pied d’un arbre, le dos appuyé contre le tronc. Au bout de quelques minutes, on ressent une vibration le long de la colonne vertébrale : le murmure perçu auparavant s’accompagne également d’un mouvement oscillatoire.

Lorsque je m’aventure sur des entiers escarpés et que mon souffle devient court, je m’arrête auprès d’un grand et vieil arbre (dernièrement ce fut un arolle), je m’appuie des deux mains contre son écorce, le temps nécessaire, et je récupère l’énergie que j’avais perdue dans la pente.     
  

dimanche 26 février 2012

Février

(02)



Février
Le temps de la transition s’annonce dans les charmilles. La mésange a entonné son titipu-titipu et son passage à la mangeoire se fait plus rare. Certains individus se sont relevés des basses températures et entament leurs parades de séduction. Recherche du partenaire, inspection des lieux de nidification, tout va s’enchaîner malgré la bise et les surprises de la météo. Quelques ébats d’intimidation entre un couple de pies et une corneille se sont déroulés au faîte du bouleau : apparemment le nid n’est plus aussi accueillant et les prétendants ont renoncé, peut-être devant l’ampleur du travail.

Février
Le temps de la fête chez l’humain, avant les privations du Carême. On brandonne, on “carnavale”, les masques et bergamasques s’ajustent et cachent pour quelques jours les visages : seuls les regards osent encore la provocation, les moqueries, les farces et attrapes, les critiques et les rires. On brûle le Rababou, le bonhomme hiver passe un sale quart d’heure sur le bûcher.

Février
Les jours s’allongent et la lumière me tire de mon sommeil plus tôt : merci soleil, j’attendais avec impatience tes rayons contre ma fenêtre. Je renoue avec l’énergie matinale et la vie se précise : sortie de mon hibernation, je rejette la couette et je hume avec délices le parfum du pain grillé. L’hiver fut long et rude, la neige et la glace ne m’enthousiasment plus : il y a un temps pour tout.
Je suis prête : mon appareil est sorti de son étui, mes crayons sont taillés. Au loin la somnolence et la paresse !