L’esprit des bois
La vie dans les
bois ressemble étrangement à celle qui est perçue dans les rêves. Parfois elle
semble apaisante, source d’accord entre le réel et l’imaginaire. Par ailleurs,
elle peut revêtir des formes angoissantes ou incertaines là où les sens se
nourrissent d’affabulations mentales.
Alors que la forêt
semble momentanément désertée par la présence humaine, on peut entendre comme
un murmure qui se transforme en chuintement et qui se propage d’arbre en arbre.
Serait-ce le
vent ? Le son du vent est un chant, une mélodie appauvrie mais tout de
même pourvue de quelques notes tenues et variables, nombreuses si l’intensité
du vent est grande.
Le ru dans le
ravin ? Le bruit de l’eau se heurtant aux galets contient des sons qui se
chevauchent, multiples et parfois ténus.
L’esprit de la
forêt est à la fois un son continu, une respiration perceptible lorsque les
activités humaines sont inexistantes. Pour mieux saisir cette essence, il est
préférable de s’asseoir au pied d’un arbre, le dos appuyé contre le tronc. Au
bout de quelques minutes, on ressent une vibration le long de la colonne
vertébrale : le murmure perçu auparavant s’accompagne également d’un
mouvement oscillatoire.
Lorsque je
m’aventure sur des entiers escarpés et que mon souffle devient court, je
m’arrête auprès d’un grand et vieil arbre (dernièrement ce fut un arolle), je m’appuie
des deux mains contre son écorce, le temps nécessaire, et je récupère l’énergie
que j’avais perdue dans la pente.