jeudi 29 avril 2010

Le Vieux

Dans mon message précédent, j’avais déclaré que je ne pouvais poster une photo de mon arbre. Nadège m’a proposé dans son commentaire de me coucher sous le cerisier pour tirer son portrait. J’ai essayé : la photo ne donne rien car l’arbre ressemble maintenant à un chandelier à trois branches disposées autour d’un axe central.
J’ai toutefois pu obtenir une photo d’une branche, sans parasite visuel. Il était 18h44.




(...) Plus proche encore à l’abri de son ombre
Frémissant d’or le vieil arbre serein (...)

Jacques Bussy (extrait de L’Arbre)

vendredi 23 avril 2010

La chamade mon coeur bat



Je l’ai quitté hier soir à la fin de ma visite aux dames de notre espace vert. Il était encore une silhouette sombre et décharnée : ses deux bras, levés au ciel, semblaient des signes de louange en l’honneur du renouveau saisonnier.

Qu’avait-il encore à chanter ce soir-là ?

À ce jour vieil octogénaire — pour un arbre ce n’est pas un pléonasme —, il nous avait accueillis voilà bientôt quarante ans. Ses rameaux, chargés de fruits pendaient sous le nez des enfants. Le jus des cerises dégoulinait sur leur pull et attirait guêpes, mouches et abeilles. Sous les branchages de l’arbre grandiose, les gosses avaient accompli leur initiation aux piqûres d’insectes. C’était l’bon temps, diraient certains...

Je l’ai quitté hier soir un brin nostalgique : les garçons n’abîment plus les buissons de petits fruits de leur grand-mère en jouant au foot. Mais lui, le vieil arbre est toujours là. D’année en année, une de ses branches se dessèche. Si nous sortons l’échelle, ce n’est pas pour cueillir ses dernières cerises — nous les laissons aux étourneaux —, mais pour scier ses atours défraîchis qui pourraient soudainement nous blesser.

Qu’avait-il encore à chanter ce soir-là ?

Il m’avait bien semblé que l’ambiance au jardin était différente des autres soirées. Peut-être que des plates-bandes montait un murmure de satisfaction car j’avais bien travaillé depuis plus d’une semaine. Le merle, si loquace d’habitude, ne pipait mot. Les chats sédentaires avaient rejoint leurs pénates et leurs croquettes à défaut de mulots.

Lorsque je l’ai quitté, il était quasiment nu : avait-il cette année encore des bourgeons ? Je ne sais pas : avec mes jumelles, j’aurais pu les apercevoir là-haut, tout près des nuages.

Et ce matin... il éclatait une nouvelle fois de beauté. Tout de blanc vêtu, là-haut près du ciel bleu, il avait fait exploser sa ramure. Des touffes nacrées nous montraient que sa sève était vive et féconde. Mon cœur battait la chamade : l’émotion, devant cette force de la nature, était si intense que je m’assis dans l’herbe afin de le contempler. Malgré son âge, son énergie jaillissait au-dessus du petit forsythia qui venait de passer son premier hiver sous sa protection.

Je ne livrerai aucune image du vieux compagnon. J’ai déjà essayé de le photographier, mais l’environnement ne peut que le déshonorer, lui qui était le roi au milieu d’un verger. Pour le prendre en image, il faut se satisfaire de parasites tels que fils à haute tension, voitures parquées et toits de maisons. Il ne mérite pas cette juxtaposition. Que sa silhouette se reconstruise au gré de votre imagination.

Note explicative sur l’expression “battre la chamade”
Liée actuellement à l’émergence d’une émotion intense provoquant des palpitations, la chamade est un roulement de tambour militaire ou une sonnerie de trompette qui a pour fonction de demander une requête à l’adversaire (trêve, capitulation).

Je profite de ce deuxième sens pour m’excuser auprès de Savoyarde et de Vicky :
Je capitule après mes essais réitérés de poster un commentaire sur votre blog. Malgré les conseils de Savoyarde, je n’y arrive pas. Je continue à vous lire et à admirer vos belles images. Un jour peut-être... 

                       
                                                                Fête de la tulipe à Morges (Suisse)

vendredi 9 avril 2010

Siffler sur la colline...

... mais pas vu de vipère aspic, ni de couleuvre coronelle, ni de lézard des souches. Trop tôt, l’air était frais, le vent soufflait fort au-dessus des clairières de Ferreyres.
Je suppose également que nos pas bruyants ont dû apeurer les reptiles qui effectuaient leurs premières sorties printanières.




Chaque année, au début d’avril, nous venons dans cet autre lieu enchanteur pour rendre hommage aux premières fleurs de ces pelouses situées à 600 mètres d’altitude au pied du Jura : les anémones pulsatilles. Le temps de leur beauté éclatante est éphémère. Aussi nous nous y prenons souvent à deux fois avant de pouvoir les admirer dans toute leur splendeur.




Les clairières à anémones et à ophrys de Ferreyres sont depuis 2003 sous surveillance. En effet, laissées en friche, elles seraient envahies par les buis qui favoriseraient l’implantation de la forêt. Aussi bizarre que cela puisse paraître, c’est au bon soin de chèvres bottées que ces clairières sont confiées. En effet, il s’est avéré que les caprins ne nuisent pas aux anémones, ni aux ophrys.
Un grand espoir habite les amoureux de ce coin de paradis : que le débroussaillage des clairières, avec le retour des insectes nocturnes, favorise l'arrivée de l’engoulevent d’Europe qui a abandonné cet habitat depuis 1970 !


Sources : Revue n°197 avril et mai 2010  La Salamandre