mercredi 25 mars 2009

J comme jaune







Rire jaune !












Rire sous contrainte, pour la forme, pour rester poli et ne pas vexer son interlocuteur ou, surtout, pour ne pas perdre la face. Le sauvetage d’une situation professionnelle dépend souvent de cette capacité à feinter.
Faire encore semblant de comprendre une plaisanterie afin de ne pas passer pour un (e) idiot (e).
Le sourire forcé accomplit très bien la tâche : il n’est pas nécessaire de s’esclaffer. Une grimace civilisée fait souvent l’affaire si on parvient rapidement à effectuer une digression.

Se référant au Dictionnaire des Symboles, Claude Duneton distingue le jaune vif et éclatant (couleur du soleil et de l’or) du jaune mat (couleur du soufre et de l’enfer). La dernière nuance devient le «symbole de la trahison, de la déception». Dans l’imagerie médiévale, le jaune est associé à cette dernière acception: «...le jaune devint la couleur traditionnelle de Judas, le traître par excellence, celui qui avait vendu le Christ lui-même!»

mardi 17 mars 2009

P comme poules






Quand les poules auront des dents !













J’étais encore enfant lorsque j’entendis pour la première fois cette expression. Mon oncle, très expert en dictons populaires et en plaisanteries langagières, avait fait usage de cette formule pour répondre à une de mes demandes très ambitieuses. Est-ce que je voulais utiliser sa moto pour faire un petit tour dans la cour ? À moins que je lui aie demandé de l’accompagner au bistrot du coin —là où il rejoignait ses copains à l’heure de l’apéritif. L’instant précis de la situation ne réapparaît pas dans ma mémoire. Il me reste toutefois le souvenir d’une grande interrogation autour de ces poules auxquelles il leur allait pousser des dents. Petite fille, je ne doutais pas de la faisabilité de l’événement. Je n’avais jamais vu l’intérieur de leur bec. La question tournait autour du moment où leurs dents allaient apparaître. J’attendais donc que la chose arrive. Ainsi, à chaque occasion, j’acceptais sagement la réponse de mon oncle car elle me semblait plausible.

Pour tenter d’expliquer le sens de l’expression, je peux me référer aux récentes tourmentes politiques qui secouent (aussi) les places financières en Suisse. Depuis des dizaines d’années (même plus de cent ans ?), le fameux secret bancaire suisse était inviolable. Il faisait partie intégrante de la culture helvétique. Nos autorités, nos banquiers, confrontés à quelques timides demandes de négociations autour de ce sacro principe, pouvaient répéter à leurs interlocuteurs:
«Remettre en question le secret bancaire ? Quand les poules auront des dents ! ».
Le secret bancaire restait intouchable. Les années passèrent, UBS grandit et se répandit par-delà l’océan.
2009. Les autorités fédérales (mises sous pression, ce n’est pas de gaîté de cœur, bien entendu) acceptent de discuter la formule binaire du secret bancaire.
Et les poules, dans cette affaire ? Elles n’ont toujours pas de dents !

samedi 7 mars 2009

C comme chevaux


Monter sur ses grands chevaux


Ah la belle balade en forêt ! Avec quarante centimètres de neige tombée ces derniers jours, l’exercice s’est révélé très sportif. Nous avons suivi pendant près de deux heures une sente tracée par des raquettes ou des … sabots. La rencontre avec les chevaux a été presque conviviale car certains se sont arrêtés à la hauteur de la photographe.
Voulaient-ils que je tire leur portrait ?
Un cavalier m’a assuré que sa monture souhaitait espérer croquer quelque chose de bon. Une pomme ? J’en avais une dans mon sac. L’avait-il sentie ? Les chevaux ont peut-être un excellent odorat.
Nous avons ainsi été rattrapés par huit chevaux et leurs cavaliers. Il m’a semblé que le paysage enneigé —avec ces cascades blanches qui glissaient silencieusement des branches— leur allait bien. Malgré les effets du dressage, leur aisance et leur fougue se mariaient avec évidence au silencieux tapis blanc.

Claude Duneton (in La Puce à L’Oreille) relève que les chevaux de combat, au XII-XIIIème siècles, étaient de grands chevaux, «de belle race et de haute taille». «Plus le cheval est grand, plus on domine son adversaire». Aussi, monter sur ses grands chevaux, c’est, écrit-il, «signe de bataille».

Un homme qui monte sur ses grands chevaux =
Un homme qui parle en colère et d’un ton hautain

lundi 2 mars 2009

D comme dur






On dit d’une personne qui n’entend pas bien qu’elle est dure de la feuille.











Hier, dimanche 1er mars. J’ai passé l’après-midi avec maman dans sa nouvelle Résidence, un établissement médico-social. Nous avons papoté dans sa chambre, elle m’a raconté que, la nuit dernière, elle était tombée de son lit. Je lui ai apporté trois fruits qu’elle adore grignoter le soir en regardant sa télé, une petite boîte de chocolat, l’anti-dépresseur fourni gratuitement par la famille (!). Nous sommes descendues dans la salle à manger pour recevoir la collation de l’après-midi. Le temps était couvert, mais je lui ai quand même proposé d’effectuer une petite promenade autour de la résidence, idée qu’elle a accueillie avec enthousiasme.

De retour dans la salle de rencontre, maman a été captée par le chant des Hébreux interprété par Nana Mouskouri. Alors nous nous sommes assises parmi les autres résidentes et nous avons écouté Nana pendant presque une heure.
Dans l’ombre des résidentes, tout en chantonnant avec elles, j’ai réalisé que le personnel de l’établissement avait une façon singulière de s’adresser à ces dames. Sans distinction, les soignantes forçaient sur le volume de la voix. Elles leur parlaient comme si elles étaient toutes sourdes. Or, ma voisine, à qui j’avais dit doucement quelques mots gentils, m’avait très bien comprise.
Des études en psychologie ont montré qu’il y avait souvent confusion des attitudes à l’égard des personnes handicapées : par exemple, on a tendance à élever la voix lorsqu’on s’adresse à un malvoyant.